Réformes et stabilité post-Printemps Arabe

Le printemps arabe de 2011 a constitué un tournant majeur dans l'histoire contemporaine du monde arabe, déclenchant une vague de soulèvements populaires qui ont ébranlé les régimes autoritaires en place et suscité des aspirations profondes pour le changement politique, économique et social. Ces mouvements, nourris par un mécontentement généralisé face à la corruption, au chômage élevé, aux inégalités sociales et à la répression des libertés individuelles, ont conduit à la chute de dirigeants de longue date en Tunisie, en Égypte, en Libye et au Yémen, tout en provoquant des troubles dans d'autres pays de la région. Dans ce contexte, l'Algérie et le Maroc se présentent comme deux cas distincts en Afrique du Nord, ayant adopté des approches différentes pour répondre aux mouvements populaires et aux demandes de réformes. L'Algérie, marquée par le traumatisme de la décennie noire des années 1990, a initialement connu des manifestations moins intenses en 2011, mais a été le théâtre du mouvement Hirak en 2019, révélant un désir profond de changement systémique. Le Maroc, quant à lui, a réagi rapidement aux protestations du Mouvement du 20 Février en 2011, voyant ensuite le Roi Mohammed VI annoncer des réformes constitutionnelles visant à renforcer les institutions démocratiques et à apaiser les tensions sociales. Face à ces évolutions, une question essentielle se pose : comment l'Algérie et le Maroc ont-ils mis en œuvre des réformes post-printemps arabe, et quelles en sont les implications pour leurs systèmes politiques et leurs sociétés respectives ? 

Contexte pré-2011 : 

Bien que l'Algérie et le Maroc soient des pays voisins partageant une histoire, une culture et une langue communes, leurs contextes politiques pré-2011 sont différents. Les deux nations ont hérité de structures étatiques post-coloniales et ont été confrontées à des défis similaires tels que le développement économique, les inégalités sociales et les aspirations démocratiques de leurs populations. 

En Algérie, le paysage politique avant 2011 était profondément marqué par l'héritage traumatique de la guerre civile des années 1990, communément appelée la « décennie noire ». Ce conflit sanglant, déclenché après l'annulation des élections législatives de 1991, que le Front Islamique du Salut (FIS) était sur le point de remporter, a opposé le gouvernement à divers groupes islamistes armés. Il a entraîné la mort de près de 200 000 personnes et des violations massives des droits humains. Cette période a renforcé la méfiance entre la population et les institutions étatiques, tout en consolidant le pouvoir de l'armée et des services de sécurité dans la gouvernance du pays. Le régime politique était dominé par le Front de Libération Nationale (FLN), parti historique qui a conduit le pays à l'indépendance en 1962. Malgré l'introduction du multipartisme en 1989, le FLN a maintenu une emprise sur la scène politique, souvent en coalition avec d'autres partis favorables au régime. Le président Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 1999, a bénéficié du soutien de l'armée et a été réélu à plusieurs reprises, notamment après une révision constitutionnelle en 2008 qui a supprimé la limitation des mandats présidentiels. 

Au Maroc, le contexte politique était celui d'une monarchie constitutionnelle dirigée par le roi Mohammed VI, qui a accédé au trône en 1999 après la mort de son père, le roi Hassan II. La monarchie marocaine jouit d'une légitimité historique et religieuse, se positionnant comme « Commandeur des croyants », ce qui lui confère une autorité à la fois politique et spirituelle. Avant 2011, le Maroc avait déjà entrepris des réformes limitées visant à moderniser le pays et à améliorer son image internationale.

Parmi ces réformes figure la création en 2004 de l'Instance Équité et Réconciliation (IER), chargée d'enquêter sur les violations des droits humains commises entre 1956 et 1999, période souvent désignée comme celle des « années de plomb ». L'IER a permis une certaine reconnaissance des abus passés et a offert des compensations aux victimes, bien que ses recommandations n'aient pas toutes été mises en œuvre. De plus, le Code de la famille a été réformé en 2004 pour améliorer les droits des femmes en matière de mariage, de divorce et de garde des enfants, une avancée saluée par la communauté internationale. Au niveau constitutionnel, le pouvoir restait fortement centralisé autour du roi. Le monarque détenait des prérogatives étendues, y compris la nomination du Premier ministre, la dissolution du Parlement et le contrôle sur les affaires religieuses et militaires. Les réformes entreprises au début des années 2000 n’ont en effet pas proposé de transformation structurelle du pouvoir.

L’Algérie : 

Entre le 3 et le 7 janvier 2011, l’Algérie connaît des émeutes d'ampleur nationale, déclenchées par une hausse brutale des prix de l'huile et du sucre. Si les médias réduisent ce mouvement à sa cause apparente, les revendications des protestataires sont autant sociales que politiques. Le mouvement débute à Oran et dans la wilaya de Tipaza, puis se propage à l'ensemble du territoire, y compris Laghouat dans le sud. En cinq jours, les émeutes causent la mort de cinq personnes et conduisent à l'intensification des revendications socio-économiques sectorielles et à l'émergence de mouvements politiques réclamant un changement politique profond. Après la chute de Ben Ali en Tunisie, la Coordination Nationale pour le Changement et la Démocratie (CNCD) est créée le 21 janvier 2011, à l'initiative d'associations, de personnalités comme Ali Yahia Abdennour et de partis politiques algériens. Les revendications initiales incluent la levée de l'état d'urgence (en vigueur depuis près de 20 ans), la liberté de rassemblement et d'expression, et l'accès de l'opposition aux médias publics. Les premières marches des 12 et 19 février rassemblent entre 2 000 et 5 000 personnes malgré un dispositif policier massif. La présence d'Ali Yahia Abdennour, militant historique des droits de l'homme âgé de 90 ans, malgré les mauvais traitements infligés par la police, constitue un symbole fort. Le gouvernement algérien refuse de reconnaître l'existence d'une crise politique, attribuant les mouvements de protestation à des enjeux socio-économiques. Les officiels mettent en avant les réformes de 1989 qui ont instauré le multipartisme et une presse libre, affirmant que l'Algérie a déjà vécu sa "révolution démocratique". Le Premier ministre souligne l'absence d'opposants politiques en prison et vante le développement économique présent au sein de toutes les régions du pays.

L'état d'urgence prolongé, en vigueur depuis 1992, a considérablement limité les libertés fondamentales des citoyens, restreignant la liberté d'expression, de réunion et de manifestation. Cette situation a exacerbé le chômage élevé, particulièrement chez les jeunes, avec un taux atteignant 23,6 % dans une population majoritairement âgée de moins de 30 ans. La pauvreté et les inégalités se sont accrues en raison de l'inflation et de la stagnation des salaires, appauvrissant une grande partie de la société. La corruption endémique au sein des institutions publiques a également alimenté le mécontentement populaire. Cette rupture entre le peuple et les institutions s'est manifestée par le sentiment généralisé de « hogra », terme décrivant le mépris des élites envers le peuple. Associé au phénomène de « harga », l'émigration clandestine, beaucoup d'Algériens se sentaient étrangers dans leur propre pays, où l'espace public était étroitement contrôlé.

La crainte du retour à la violence a également dissuadé de nombreux citoyens de s'engager dans des mouvements de masse. La guerre civile des années 1990, qui a causé environ 200 000 morts, a laissé une empreinte profonde dans la mémoire collective. Le « Printemps noir » de 2001 en Kabylie, où 132 personnes ont perdu la vie, a renforcé cette appréhension. La peur de replonger dans le chaos et la violence a donc freiné l'élan protestataire. Le gouvernement a utilisé la rente pétrolière pour acheter la paix sociale, répondant aux revendications socio-économiques sectorielles sans aborder les demandes politiques profondes. Des mesures telles que l'acceptation systématique des projets de l'Agence Nationale de Soutien à l'Emploi des Jeunes (ANSEJ) ou la suspension des redressements fiscaux ont illustré cette stratégie. Cette redistribution partielle de la rente a permis de contenir les protestations sans modifier le système en place.

Le 15 avril 2011, le président Abdelaziz Bouteflika a annoncé des réformes constitutionnelles dans une tentative de répondre au mécontentement croissant. Ces réformes comprenaient la création d'une commission consultative chargée de proposer des modifications à la constitution, notamment la réintroduction de la limitation des mandats présidentiels. Des réformes législatives ont également été annoncées, concernant les partis politiques, la loi électorale, la presse—avec la dépénalisation du délit de presse—et le code départemental pour accroître l'autonomie des élus locaux. Cependant, ces annonces ont suscité le scepticisme parmi la population et l'opposition. Les réformes proposées restaient vagues, sans échéancier précis pour leur mise en œuvre, ce qui a alimenté les doutes quant à la réelle volonté du gouvernement de procéder à des changements significatifs. De plus, la présidence de la commission consultative a été confiée à Abdelkader Bensalah, perçu comme un produit du système et peu susceptible de conduire à des réformes profondes. 

Le Maroc : 

Le Maroc a connu, durant le printemps arabe, un mouvement de protestation significatif appelé le Mouvement du 20 février. Ce mouvement a débuté sur les réseaux sociaux, avec une mobilisation importante sur Facebook, Twitter et YouTube, où des vidéos et des messages appelant à la manifestation ont largement circulé. Le nom du mouvement est d'ailleurs issu du hashtag #20fevrier, correspondant à la date de la première grande manifestation organisée en 2011. Le Mouvement du 20 février a rassemblé une coalition inédite : des associations nationales comme l'Association marocaine des droits humains (AMDH), des groupes politiques, notamment la gauche radicale et des partis et associations islamistes, ont uni leurs forces. Cependant, la plupart des partis politiques officiels sont restés en retrait. Par exemple, le Parti de la justice et du développement (PJD), seul parti islamiste légal, a interdit à sa jeunesse de participer aux manifestations. Contrairement aux mouvements révolutionnaires dans d'autres pays, le Mouvement du 20 février n'a pas réclamé le départ du roi Mohammed VI, ni la fin de la monarchie. Les manifestants, profondément attachés à la personne du roi en tant que Commandeur des croyants et descendant du prophète, ont cependant demandé une réforme profonde de la structure du pouvoir et ainsi des prérogatives royales. Cependant, les critiques visaient surtout certains chefs d’entreprise et membres de l’administration, et plus largement, une élite accusée de corruption et de népotisme. 

Face à la montée des protestations, le roi Mohammed VI a réagi, dans un discours prononcé le 9 mars 2011,  en annonçant une réforme constitutionnelle et la tenue d'un référendum. Contrairement aux pratiques de son père, qui imposait des réformes préparées par son propre cabinet, le roi a nommé une commission consultative pour élaborer les changements, promettant de renforcer les pouvoirs du Premier ministre, du gouvernement et du Parlement. Les sept propositions clés avancées par le roi comprenaient « la reconnaissance de l'identité plurielle du Maroc, avec l'amazighité au cœur, la consolidation de l'État de droit et des institutions démocratiques, l'élargissement des libertés individuelles et collectives, le renforcement des droits humains sur les plans politique, économique, social et culturel, l'indépendance du pouvoir judiciaire et le renforcement des prérogatives du Conseil constitutionnel, la séparation et l'équilibre des pouvoirs avec un Parlement issu d'élections libres, et la modernisation des institutions avec un gouvernement élu par la majorité populaire et un Premier ministre issu du parti majoritaire disposant de pouvoirs renforcés ». 

La réaction initiale au discours royal a été mitigée. Des divisions sont apparues au sein du mouvement : la gauche radicale, notamment Annahj Addimocrati, et le groupe islamiste Al Adl Wal Ihsane ont rejeté la procédure, critiquant la nomination non démocratique de la commission constitutionnelle et réclamant une Assemblée constituante élue. Le 20 mars, une nouvelle mobilisation a eu lieu, avec des slogans plus radicaux encore. 

Le roi a présenté la nouvelle constitution le 16 juin 2011, annonçant un référendum pour le 1er juillet. Le processus a été rapide, avec une forte mobilisation des institutions, des mosquées et des médias en faveur du « oui ». Les résultats ont fait état d’un taux de participation de 70 % et d’une approbation à 98 %. Le roi a conservé des pouvoirs exécutifs importants, notamment la nomination et le limogeage des ministres, la présidence du Conseil des ministres, la dissolution du Parlement et le commandement suprême des forces armées. Il a maintenu son statut de Commandeur des croyants, consolidant son autorité religieuse. Les articles de la constitution lui permettent de gouverner par décrets et de conserver une influence majeure sur les affaires de l'État. En vertu de la nouvelle constitution, des élections législatives anticipées ont eu lieu le 25 novembre 2011. Le Parti de la Justice et du Développement (PJD) a remporté 107 sièges sur 395, devenant le premier parti islamiste à diriger le gouvernement marocain. Comme le veut la nouvelle constitution, le chef du PJD, Abdelilah Benkirane, est devenu Premier ministre. L'accession du PJD au pouvoir peut être vue comme une victoire pour une partie mécontente de la population qui souhaitait un changement politique. 

Réformes au sein des deux pays : 

L'Algérie a tenté d’entreprendre des réformes politiques visant à répondre aux aspirations de la population. En 2016, des amendements constitutionnels ont été adoptés, apportant des changements notables au système politique. Parmi les réformes les plus significatives figure la limitation des mandats présidentiels. Désormais, le président de la République ne pouvait exercer que deux mandats consécutifs, réinstaurant une mesure qui avait été abolie en 2008 pour permettre au président Abdelaziz Bouteflika de briguer un troisième mandat. Une autre avancée majeure est la reconnaissance de la langue tamazight comme langue nationale et officielle aux côtés de l'arabe. Le tamazight, langue des Amazighs, est ainsi inscrit dans la Constitution, ce qui marque une étape importante dans la reconnaissance des droits culturels et linguistiques des populations amazighes. Cette décision répond à de longues années de revendications pour la préservation et la promotion de l'identité amazighe en Algérie. Cependant, ces réformes ont été critiquées pour leur manque de profondeur. Malgré la limitation des mandats, le pouvoir reste fortement centralisé, et les mécanismes de gouvernance démocratique sont jugés insuffisamment renforcés. La reconnaissance du tamazight nécessite également des mesures concrètes pour être pleinement effective, notamment son intégration dans l'éducation, les médias et l'administration publique, chose jusqu’à maintenant peu constatée.

En réponse aux manifestations du Mouvement du 20 Février, le Maroc a adopté, comme écrit précédemment, une nouvelle constitution par référendum en juillet 2011. Cette réforme constitutionnelle visait à instaurer des changements institutionnels significatifs pour répondre aux aspirations démocratiques de la population. Parmi les modifications clés figure le renforcement du rôle du Premier ministre, désormais intitulé Chef du gouvernement. Ce dernier est nommé par le roi parmi les membres du parti arrivé en tête des élections législatives, ce qui confère une plus grande légitimité démocratique à l'exécutif. Le Chef du gouvernement se voit attribuer des pouvoirs accrus, notamment la responsabilité de diriger et de coordonner l'action gouvernementale. La nouvelle constitution promeut également l'indépendance du pouvoir judiciaire. Elle établit le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, chargé de garantir l'autonomie de la justice vis-à-vis du pouvoir exécutif et législatif.

En outre, la constitution de 2011 met l'accent sur la promotion des droits humains et des libertés individuelles. Elle consacre les libertés d'expression, d'association et de réunion pacifique, tout en s'engageant à respecter les conventions internationales en matière de droits humains. L'Article 5 de la Constitution dispose:

« L'arabe demeure la langue officielle de l'État. De même, l'amazigh constitue une langue officielle de l'État, en tant que patrimoine commun à tous les Marocains sans exception ».

Dans la continuité de l’Algérie, cette reconnaissance de l'amazigh comme langue officielle aux côtés de l'arabe marque un progrès significatif dans la protection des droits linguistiques des minorités. Elle répond aux revendications des populations amazighes, qui ont été parmi les premières à demander un État civil respectueux de leur culture et de leur identité,  en encourageant l’enseignement dans les écoles, l’utilisation de cette langue dans les médias et son intégration dans la vie publique. Sur un autre plan, la nouvelle constitution renforce le rôle des collectivités territoriales et prévoit le transfert de certaines compétences de l'État central vers les gouvernements locaux. De manière comparable, en Tunisie, après la révolution de 2011, la constitution de 2014 prévoit à son Article 132 le transfert de compétences aux gouvernements locaux, renforçant ainsi la décentralisation.

Le printemps arabe de 2011 a été un moment charnière pour l'Algérie et le Maroc, malgré des contextes politiques et historiques différents, les deux pays ont été confrontés à des revendications similaires pour plus de démocratie, de justice sociale et de respect des droits humains. 

En Algérie, les amendements constitutionnels de 2016, tels que la limitation des mandats présidentiels et la reconnaissance du tamazight comme langue officielle, ont été perçus comme des avancées symboliques. Néanmoins, ces réformes n'ont pas réussi à apaiser le désir de transformation profonde du système politique. Le mouvement Hirak, qui a émergé en 2019, témoigne de l'insuffisance des changements entrepris. Les Algériens continuent de réclamer des réformes profondes.

Au Maroc, la nouvelle constitution adoptée par référendum en juillet 2011 a introduit des changements notables, tels que le renforcement du rôle du Chef du gouvernement, l'indépendance du pouvoir judiciaire et la promotion des droits humains et des libertés individuelles. La reconnaissance de l'amazigh comme langue officielle aux côtés de l'arabe a également marqué un progrès significatif dans la protection des droits culturels. La poursuite des réformes est indispensable pour renforcer l'État de droit, assurer une gouvernance transparente et démocratique, et gérer les inégalités sociales et régionales qui demeurent prononcées. Il est crucial de mettre en œuvre les réformes de manière effective pour répondre aux attentes de l'ensemble de la population.

Sur le plan régional, l'Algérie et le Maroc jouent un rôle déterminant dans la stabilité du Maghreb. Leur capacité à mettre en œuvre des réformes efficaces et à répondre aux aspirations de leurs citoyens influencera la dynamique régionale. La question se pose de savoir si ces deux pays choisiront la voie de la coopération pour relever ensemble les défis communs, ou s'ils continueront dans une rivalité qui pourrait exacerber les tensions dans un contexte post-printemps arabe.

Sources

1. Hmed, Choukri. Les Printemps Arabes : Révoltes ou Révolutions ? Éditions du Seuil, 2023.

2. Chena, Salim. "L'Algérie dans le Printemps Arabe : entre espoirs, initiatives et blocages." Dynamiques internationales, Numéro 77, Printemps 2011.

3. Direche-Slimani, Karima, Nessim Znaien, et Aurélia Dusserre. "Chapitre 13. Le Maghreb dans les Printemps arabes." In Les Printemps arabes, pages 277-297, Éditions Armand Colin, 2023.